Dans la limousine de l’hôtel, Boris n’est pas inquiet. Il a pris toutes ses précautions. Pour ne pas attirer les regards, il a posé ses liasses de billets au fond d’un sac en plastique, mais laisse dépasser ostensiblement une serviette de table, une bouteille d’eau et un sandwich. Il sait que des familles entières ont l’habitude d’amener tout le repas du dimanche sur leur bateau.
Vers midi le spectacle des grandes artères est hallucinant. Beaucoup de véhicules ne respectent pas le feu rouge, certains conducteurs même accélèrent à l’orange. Le panneau stop ne sert à rien. Des automobilistes klaxonnent le novice bien élevé qui commet l’erreur de marquer un temps d‘arrêt. Le klaxon, lui, semble n’avoir que deux fonctions : le désaccord et l’insulte, exprimée rageusement par trois coups de suite.
Bien calé sur son siège arrière, Boris observe les faits et gestes de son chauffeur. Celui-ci ne s’abaisse pas à crier comme un vulgaire camionneur local, mais il maîtrise mieux que personne l’art de la queue-de-poisson et de l’esquive.
Dès l’arrivée à Xochimilco, des panneaux affichent des publicités pour les bateaux, les « Trajineras » colorés. Le chauffeur a ordre d’attendre son client sur place.
Miguel est là, au rendez-vous.
-Tiens, voici ton billet.
-Mais…tu ne m’avais pas dit qu’on prenait le bateau…
-Si, si, c’est mieux. Il y aura un arrêt pour prendre une boisson dans un village. Nous descendrons. Le type habite derrière le restaurant.
Pas le temps de répondre. Aussitôt, l’embarcation est plongée dans la musique. Un orchestre de mariachis prend possession du lieu avec ses trompettes et ses violons. Tandis que des enfants jettent des cailloux dans l’eau, la Carmencita largue les amarres.
JAC, le 11 octobre 2013
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