4 janvier 2011, Siem Reap, Cambodge
Elle a déplié sur le trottoir, à l’ombre d’un frangipanier, un vieux journal montrant les dernières tendances des bourses asiatiques.
Son bébé dans un bras, elle prépare un biberon. Tous les ustensiles nécessaires sont alignés devant elle : la boîte de lait en poudre, la bouteille d’eau, la dosette, le biberon.
L’enfant ne dit rien. Il ne perd rien des gestes lents et précis de sa mère. Elle respecte scrupuleusement les doses : six cuillérées pour un repas de 120...
Les passants passent, impassibles.
Il est midi. Les touristes japonais sont venus en nombre aujourd’hui. Des autobus de voyage les déversent près du vieux marche, là où les restaurants sont au coude à coude, dans l’espace et dans la concurrence.
Le petit boit à grandes tétées, sans faire de pose. Doucement la maman écarte les mouches qui virevoltent dans les parages.
Au milieu de l’après-midi, la chaleur baisse un peu. Les motocyclistes envahissent les rues et les ponts. Les engins pétaradent de bon cœur à quelques mètres de ses pieds.
Au fil des heures elle déplace son journal en fonction de l’ombre qui avance.
A présent les Occidentaux descendent en ville pour se reposer de la visite des temples et se détendre devant une bière.
C’est aussi le moment du troisième biberon de la journée et des rations mesurées, maniées avec précaution.
La lumière dorée est belle. Les amateurs de photographies sur téléphone portable mitraillent la rue, arrosent les boutiques, balaient les trottoirs. Pendant ce temps les Japonais et les Coréens immortalisent méthodiquement les quatre murs du restaurant qu’ils ont choisi et le contenu de leur assiette.
Quand le soleil se couche, la madone transporte sa progéniture et son quotidien à l’abri, derrière des broussailles.
Au milieu de la nuit, sous des feuilles de bananier, s’endorment deux silhouettes grises.
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