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Autrement dit,
Eloge du bassine (ou cuvette) portugais
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Trois S ø 20 jaunes d'or gigognes, supportant une fournée de tomates "grown in LOF"
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No Alguidar, no way
Quand je vais en France et qu’il m’arrive de cuisiner, je suis consterné par l’absence de cuvettes à tout faire dans les offices. Certes, on y trouve parfois, sous l'évier, une cuvette à vaisselle et encore… Le lave-vaisselle l’a détrônée.
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La batterie presque au complet. On reconnaît la XXL ø 50 verte à droite où se dessale la morue. Au premier plan, la XL ø 35 orange où se lave la salade (au moins 3 eaux).
A gauche en bas, l'ex saladier à double paroi (avec épis de riz enchâssés) acheté chez le Chinois. Pas étanche. On l'a débarrassé de ses chinoiseries pour en faire un alguidar à saler le poisson. C'est un L ø 28 P (P pour profond).
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Au Portugal, l'alguidar est Roi
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Au Portugal, c’est l’inverse de la France : le cuvette en plastique règne en maître de maison. On peut s'en procurer partout à très très bon marché, de toutes les couleurs et de toutes diamètres, ce qui facilite non seulement le rangement gigogne, mais aussi le choix des usages.
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Et le van dans tout ça?
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L'Ile sous le van
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Le cuvette sert à tout, comme le van en paille tressée des Iles Mascareignes, dont fait partie La Réunion.
Mémé utilise le van pour éplucher, trier, bricoler le végétal.
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Mémé coiffée de l'un de ses magnifiques chapeaux de paille, légers comme le van
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Au Portugal, on utilise le cuvette, ce qui ne m’empêche pas de me servir des deux, van et alguidar. Dans le van on pose, on expose et dans l’alguidar on pose, on expose aussi, mais on lave en plus.
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Alguidar, signe ♂
L’alguidar est du genre masculin. Le Portugais dit « un cuvette, un bassine ». Ne cherchez pas à comprendre. Le Basque fait de même. Un chaîne de vélo. Une chêne centenaire. Quand on demande à Beñat de couper la chaîne qui bloque la barrière, il prend la tronçonneuse et abat le vieux chêne.
Anecdote citée par le maître El Burlon de Urruña.
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J’ai donc un stock généreux d’alguidares (préfixe al, sans aucun doute, une survivance mauresque, comme dans Alcácer.). J’en ai acheté la moitié pour trois francs six sous. L’autre moitié m’a été offerte en promotion avec l’achat de plusieurs caisses de rangement chez Os Mosqueteiros (Porthos, Athos et Aramis), là où mais barato não hà. C’est dire la ruine pour le maximum de confort en cuisine.
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Quand je reviens de LOF, chargé d’une merveilleuse cueillette, je sors sans lésiner l’arsenal d’alguidares. C’est propre, doux au toucher et se lave à grande eau. S’il nous arrive d’écosser des grains, nous nous choisissons chacun une ø 20 jaune et nous nous positionnons en vis-à-vis ♂ ♀ et nous écossons.
Le bruit de chute des grains dans l’alguidar est un plaisir raffiné que ne connaissent guère nos frères urbains qui après nous vivront.
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Le pois fait des claquettes,
A minuit, à midi...
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Si je prépare des coulis, j’utilise toute la batterie ou presque pour recueillir d’abord les tomates échaudés (eh oui, mes censeurs orthographiques, à commencer par Microsoft, tomate est masculin en portugais. Je suis désolé. Un bassine. Un tomate...).
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Je pèle dans une un autre. J’accroche un chinois au rebord du bassine et j’épépine seul. Car épépiner le tomate ne peut être qu’un acte solitaire. Au premier tomate épépiné, vous souffrez. Que personne n’en profite pour m’appeler au téléphone, j'ai les mains engluées, poisseuses ! Au trente sixième tomate, vous êtes aguerri.
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Cela vaut aussi pour la ratatouille qui nécessite de l'ordre dans le dispatching.
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Revenons à nos coulis.
Bien sûr, il faut prévoir un modèle M ø 30 pour recueillir la chair et la réserver le temps de mitonner le coulis :
Echalote émincée, huile d’olive, ail épluché, chair de tomate concassée, bouquet garni, sel (peu car ça va réduire beaucoup), poivre. Vingt minutes à feu doux. Mixage. Refroidissement. Mise en barquettes et congélation.
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Vous n'avez pas idée du bonheur enivrant que procure ce grand cru au sortir du pressoir à main. Joker, Granini & Cie peuvent concourir: perdu d'avance.
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Au fond du bassine à épépiner, reste un bon litre de bon jus (comme dirait Bocuse) que l’on va saler, poivrer et mettre aussitôt en bouteille au château et réserver au frais.
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Voilà à quoi on s’amuse en Alentejo, au plus fort de l’été, quand on n’a rien d’autre à faire qu’à attendre la traditionnelle resucée d’été du mois d'octobre : l’été indien.
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Au moins du XXXL ø 60
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Tout en lavant les cuvettes à grande eau (tant qu’il y aura de l’eau), on peut chanter, sans aucun respect du texte, mais en imitant la voix sucrée de Joe Dassin :
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Ô Nira, où tu voudras, quand tu voudras
Et on sèmera encore, lorsque la mourre ce rat mort
Toute la vie sera pareille à ce matin
Ô cool, heure de lait-thé indien…
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Arrivage d'une frisée qui sent la bonne terre de Cercal : alguidar XL ø 50 aussitôt. Il faut y voir clair.
Là c'est un vrai saladier L ø 35. On ne mange pas dans l'alguidar. Mais de grâce, Français, ayez un grand saladier pour mélanger sans faire chuter une feuille à terre ! Et de grâce aussi, pas de sauce salade industrielle, mais bonne huile d'olive, bon vinaigre, versés au pif, généreusement !
On chantera aussi, avec une pensée affectueuse pour la Nouvelle Orléans et Nino Ferrer,
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C’est un endroit qui ressemble à la Louisiane
A l’Italie
Il ya du linge étendu sur la terrasse
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Et c’est joli
On dirait le Sud,
Le temps dure longtemps,
Et la vie sûrement,
Plus d’un million d’années
Et toujours en été.
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Nino Ferrer
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Bougainvillées. Huile sur canevas JCP.
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Génial. J'ai ri à haute voix, plutôt rare en lisant sur l'ordinateur, d'habitude c'est juste dans ma tête.
Je ne verrai plus jamais mes cuvettes (oups, alguidares !) de la même façon, ça c'est une certitude.
Rédigé par : Miam | 29/10/2005 à 13:42
Mais c'est qu'il est plus portugais que moi !
Rédigé par : Joao | 10/10/2005 à 16:19
Dire que certains nous bassine sur certains sujets... et toi nous enchante avec tes bassines, cuvettes, saladiers et barquettes en tout genre.
Rédigé par : Mijo | 06/10/2005 à 14:21
je n'avais jamais autant vu d'Alguidar!
Rédigé par : Mimosa | 03/10/2005 à 16:38
Douceur de vivre au Portugal...
Rédigé par : Elvira | 03/10/2005 à 14:09
oui, le beau temps c'est beau...mais il faut pas le dire trop fort. Alors, l'Alguidar, voilà un sujet difficile que tu as traité de main de maître: renseignements techniques forts utiles,photos merveilleuses et finalement quel plaisir de pouvoir retrouver les paroles de lait-thé-indien et du sud. Alors, à quand la chansonnette pendant la lecture?
Rédigé par : ana assunção | 03/10/2005 à 00:11
ce note est bien plaisant à lire, le photo du bouteille de jus de tomate est magnifique, et la dernière tableau (la Bougainvillée) qui reprend tout le palette de ton collection de cuvettes. Merci jc.
as tu vue l'été indien qu'on a, cette soir on a mangé dehors (24° à 10 heures), on a aussi pris la petite déjeuner dehors cette matin, cet ap midi 32° au piscine. Qu'est-ce que c'est bien ici.
Rédigé par : jp | 02/10/2005 à 22:01