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Encore un peu d'histoire à se farcir,
mais ça ne peut pas faire de mal
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Les farcis figurent en bonne place dans la gastronomie provençale. Le bel été venu, il est de coutume de farcir courgettes, aubergines, tomates, poivrons. Mais sait-on que leur tradition remonte au 14 juillet 1789 et à la prise de la Bastille?
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14 juillet 1789 au matin
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Une armada de Sans-Culotte assiège la Bastille. Son Gouverneur, Courget de Béringelle, résiste. Une poignée d'assaillants parvient cependant à entrer en secret dans la forteresse et capture la femme du geôlier, Charlotte Courget qui sera prise en otage.
Comme une traînée de poudre, la nouvelle se répand, côté insurrection.
La pauvre jeune femme devient alors objet de la vindicte populaire. Ils seront des centaines à lui passer sur le corps, dans les fossés, sur les barricades. Les Sans-Culotte ont cet avantage certain de n'avoir point à se dévêtir. Il y a foule. On fait la queue.
Acculée, la garnison cède et se rend. Courget de Béringelle sera décapité en dépit de la promesse faite par les assaillants de laisser la vie sauve aux troupes et officiers en cas de reddition.
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A Versailles, le duc de Rochefoucauld-Liancourt réveille le roi en sursaut et lui apprend la nouvelle.
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- Sire, y a de la baston sur Paris. La Bastille est naze !
- Qu'on la reconstruise fissa !
- Non, Sire, c' est pas une vanne, la Bastille est HS ! Courget s'est fait sécher. Y z'y ont coupé la tronche!
- Nan! Et la Courgette?
- Eh beh, Sire, les locdus se la farcissent grave aux cris terrifiants de Farcissons-nous La Courgette !
Depuis ce matin, on peut dire que ça le fera pas.
- Prise de tête ! J'ai la haine ! S'écrie enfin le roi qui rarement sortait de ses gonds. Il était serrurier.
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La Veuve Courget survivra aux outrages, on ne sait par quel miracle. Presque neuf mois plus tard, elle mettra au monde des faux triplés: deux garçons, une fille. Le délai de viduité de 240 jours n'étant pas écoulé, les enfants seront réputés ceux du défunt père. Les frères et soeur Courget de Béringelle émigreront en Espagne avec leur maman. Ils seront recueillis chez les Sanchez, à Grenade, dans une fabrique de chocolats. Chocolates y caramelos Sanchez. Vous connaissez ?
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La révolution fait rage jusqu'à la mauvaise chute de Robespierre sur le pistolet chargé du Gendarme Merda. Elle se calme dans le Directoire. Le 17 novembre 1796, Bonaparte s'empare du Pont d'Arcole. Ses grenadiers pataugent dans un champ de cucurbitacées qu'ils dévorent crues.
Bonaparte met les troupes en garde sur les dangers de la tourista, une affection intestinale qui a déjà valu la perte sévère de la bataille de Valmy aux Prussiens, paralysés sur place par un excès de raisins verts, déjà intrinsèquement laxatifs, mais de plus, traités à la bouillie bordelaise. Le verjus ne pardonne pas.
A Valmy, ce matin-là, le soleil s'était levé sur une morne plaine vibrante de gémissements et de gargouillements dont Dumouriez tira largement profit.
- Mes braves, sachez que l'expression "prendre une déculottée" tire son fondement de la bataille de Valmy. Alors, si m'en croyez, mangez cuit!
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Revenons à Arcole. Fort de l'appel du 17 juin lancé par Bonaparte, l'officier de bouche eut l'idée de farcir les légumes et de les cuire dans sa popote roulante, tirée à bras par des grognards.
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Le farci était né !
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Dès lors, les canons de la préparation se répandirent dans la péninsule italienne, remontant jusqu'au Comté de Nice et Savoie et jusqu' en Corse, bien sûr. Mais ce n'est que le 31 mars 1889, en pleine inauguration de la Tour Eiffel, que le jeune prince de la gastronomie Curnonsky (il n'a que 17 ans), créera la Courgette Farcie Curnonsky, en hommage au tragique destin de Charlotte Courget.
On n'est pas sérieux quand on a 17 ans, soufflera Cournonsky à Rimbaud !
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Courgettes farcies
avec ou sans Curnonsky
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J'ai choisi mon morceau de viande. Un beau plat de côtes désossé que le boucher a soigneusement paré puis haché sous mes yeux dans un hachoir propre. Il fait chaud. Cuidado com carne picada. J'ai aussitôt précuit la viande à sec, ne ménageant pas mes coups de spatule pour bien en détacher les grains, comme avec le couscous. J'ai salé très légèrement.
Le moment venu, prendre des courgettes moyennes, car il va falloir les creuser en barquettes à l'aide d'une petite cuillère ou d'une gouge à courgettes (en vente dans toutes les bonnes quincailleries). Réserver la chair ainsi ôtée.
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Monder, épépiner les tomates dont la chair sera jointe à celle des courgettes. Le tout sera concassé grossièrement au couteau.
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A part, mélanger de la mie de pain trempée, deux oeufs entiers. Réserver.
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Ciseler un gros oignon et le laisser fondre doucement avec de l'ail. Ajouter la chair de courgettes et de tomates concassées. Bien mélanger le tout et finir d'écraser à la fourchette. Ajouter thym et laurier. Laisser compoter ce mélange 30 minutes. Juste en fin de cuisson, rajouter une bonne dose de persil ciselé. Laisser bien tiédir.
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Une fois le mélange bien refroidi, joindre la viande hachée, la mie et les oeufs. Tartiner à la fourchette afin de rendre le tout homogène. Rectifiez le sel si besoin est.
A ce moment précis, une bonne lampée de cognac ou de whisky. J'avais du whisky, ça rime avec Curnonski. Merci à JP pour le tuyau !
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Prendre une plaque de four huilée. Y parsemer des grains de riz qui vont absorber l'eau excédentaire. Merci encore, JP!
Chauffer à 200°C.
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Garnir généreusement les barquettes. Enfourner. Trente minutes suffisent.
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On y est.
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Qu'en dirait Monsieur Curnonsky?
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- Pas mal , certes, mais la farce est un peu grossière, n'est-il pas ?
- Non non, Prince, c'est un effet de téléobjectif !
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Allez, à table. Un rosé s'impose. Et puis c'est bon. Je crois être rassasié quand j'ai la sensation que j'en reprendrai bien une petite. J'en reprends une petite et puis une autre.
Digestion impeccable. Et ce matin, il faisait frais: 22°C seulement au réveil et toute une matinée sous la couche nuageuse. L'Alentejo, c'est bien.
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Et le "petit farci niçois" alors ? Courgettes (rondes ou longues) oignons, tomates, pommes de terre, fleurs de courgettes. Ca c'est du petit légume farci !
Rédigé par : Phil' | 22/07/2007 à 21:08
Aprés avoir réfléchi et comme la féte de la fédération le 14 juillet 1790 devait plus ou moins célébrer la prise de la bastoche un an plus tot onvapachipoter et dire que le 14 juillet c est la fédé et labastoche main dans la main .Si c est pas du radicalisme cassoulet ça y ressemble sblar
Rédigé par : sablar | 16/07/2007 à 18:01
Rédigé par : sablar | 16/07/2007 à 17:35
Mon cher JCP
Je crois que le 14 juillet célèbre la fête de la fédération en 1790, le même jour et non la prise de la Bastoche en 1789.
Pédant qui s'en dédit, là quoi .YAPAQUE les courgettes qui sont farcies. Si erreur, Sablar a la lanterne.
De JCP @ Sablar
Non, Sablarissime, tu ne fais pas erreur, du moins historique. Par contre, ton clavier ignore les accents, aigus, graves et circonflexes (Ton clavier ou ta frappe de commissaire divisionnaire à un doigt sur machine Japy).
Mais en dehors de la jouissance que j'éprouve à infléchir les accents de ta copie, ce qui me réjouit par dessus tout est que ton accent de Decazeville et de Capdenac réunis, transparaît en filigrane, cong...
Rédigé par : sablar | 16/07/2007 à 17:34