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Depuis que je vis au Portugal, j'ai rarement entendu un Portugais parler de cerfeuil. Olimpio, le jardinier du village, n'en avait jamais vu, même après trente ans de France jardinière. Le persil, la Salsa, ça oui, il connaît ! Mais le cerfeuil, cette espèce de persil (qui n'a rien à voir avec le persil), inconnu au bataillon. Il aura fallu que le mien pousse et prenne de l'ampleur pour qu'il constate que persil et cerfeuil, sont aussi différents que carotte et navet. Reste à convaincre Olimpio sur la foi du goût, à présent.
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Olimpio est employé par la communauté des villageois pour entretenir les jardins. Un compagnon précieux pour conjurer les mauvaises herbes, faire de l'ordre, arroser.
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J'en ai semé partout de façon empirique. Ma première constatation est que le cerfeuil déteste le sable et préfère de loin un terreau léger et bien noir. Il a tendance à se protéger naturellement du soleil et recherche l'ombre des fleurs sous lesquelles il se réfugie. C'est une herbe de fraîcheur. Dans le sable, il s'étiole et grille.
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Cerfeuil au sable, pas bon!
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Cerfeuil à l'humus, bon pour le grand frisson !
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Dans le bel humus, il bouquette, frise Le cerfeuil est gracile. Ses tigettes sont comme des gambettes de faon, mal assurées. Sa force est la grégarité. En bouquet, en buisson, il tient la rampe. Par contre, arrosez-le, même en brouillard ténu, il ploie sous les gouttelettes. Mais dès que le brouillard s'est évanoui, mon cerfeuil redresse la tête et frissonne dans le vent.
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Cerfeuil de haute école buissonnier
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Avez-vous déjà contemplé le frisson léger d'un buisson de cerfeuil? Non? Tentez l'aventure. C'est attendrissant. Faites semblant de frissonner vous-même et il vous répondra aussitôt par un frisson en écho. C'est un compagnon de contemplation, une herbe de compagnie qui, pour ma part, remplace avantageusement le chienchien de tout un chacun qui crotte partout, qui gueule tout le temps et qu'il faut aller promener de guerre lasse. Car les promeneurs de chiens n'ont jamais l'air de s'amuser. Ce n'est qu'un avis personnel.
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Cerfeuil cueilli à l'heure blême
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Si j'écris ce billet, c'est que je suis encore sous le coup de l'émotion, après avoir cueilli mon premier vrai bouquet que j'ai sommairement lavé, puis finement ciselé. Les brins sont allés verdir une triplette d'œufs brouillés, tournés à la spatule de bois et cuits (appelle-t-on cela cuire?) au bain-marie comme il se doit. Bonheur intense.
Mon herbe de compagnie a dépassé mes attentes en parfums, en saveurs un rien anisées. Tout en dégustant, je me suis dit en moi-même que j'aurais voté les yeux fermés pour un candidat à la présidence de la République qui aurait écrit en tête de son programme:
"Je veux que Françaises et Français cultivent leur cerfeuil sur leur balcon, dans leur jardin, dans les bacs et les espaces publics.
Qu'ils apprennent à cuisiner le gâteau de carottes fondantes au cerfeuil de Michel Guérard.
Que toutes les cantines de France cérifolient leurs omelettes aux pommes de terre.
Que les vinaigrettes ordinaires sortent de leur consternante banalité et apprennent à ne plus se passer de cerfeuil.
Et nous irons tous au paradis, car sans cerfeuil, point de salut.
Vive la France !"
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Ah je n'aurais pas hésité dans mon choix républicain ! En un mot, mangeons du cerfeuil ! Y compris au petit déjeuner avec les œufs brouillés comme cela se pratique déjà dans certaines familles d'épicuriens en Alentejo. J'en connais.
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En entrée, râpez quelques jeunes carottes (à fanes, pas les rondins de bois du rayon fruits & légumes). Assaisonnez et parsemez de cerfeuil. Vous direz "avant, je n'avais jamais mangé de carottes râpées"…
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Vus d'avion, pêcher avec des pêches, tomate, frisée de Meaux, laitue, roquette, courgette, concombre, radis, céleri, coriandre, ciboulette, sauge et bien entendu, cerfeuil à gogo
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Dire qu'on appelle l' anthriscus cerefolium, le cerfeuil commun. Ah que l'adjectif commun lui sied mal!
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Merci à JP & Ann, à LOF, à Jef d'avoir su si bien me transmettre le goût de la culture. Ce sont Papa et Maman qui seraient contents:
- Ah, enfin, tu t'y es mis !
- Ben oui, le cerfeuil...No chervil, no life...
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Il faudra que je regarde, aux Açores. Ils utilisent énormément d'herbes (surtout du fenouil, d'ailleurs)...
Beijinhos.
Rédigé par : Elvira | 06/06/2008 à 18:18
bel éloge du cerfeuil
c'est une plante qui a l'air fragile
et puis quand on la mange bien fraiche
cueillie le matin
elle est puissante, présente
veux tu des haricots, il y a des mange tout, des beurres, des verts
si tu en veux tu peux venir mardi
qu'en penses tu ?
Rédigé par : jp | 01/06/2008 à 22:11
Alors là, JCP, je suis ravie par tant de beauté dans ton jardin! Les fines herbes sont si fines (dommage pour le pêcher - impossible de le récupérer?) Bravo, c'est beau!
Rédigé par : Louise | 01/06/2008 à 03:30
Ah! le cerfeuil trône sur toutes les bonnes tables! Cette année, le cerfeuil perpétuel ou livèche ou "cerfeuil maggy" a fait son entrée dans mon home sweet home. J'en raffole
Rédigé par : Marylène Sud | 27/05/2008 à 06:31
Je crois bien que c'est le cerfeuil qui parfume les vinaigrettes les plus fines. Moi qui trouve l'estragon d'un anisé trop prononcé, je lui préfère. Les alentejanos les plus gourmets devraient aimer cette aromatique qui devrait bien se tenir à côté de leur délicieuse (et fort jolie) "hortelã da ribeira".
Rédigé par : Phil' | 25/05/2008 à 02:42