L'atelier de Pascale
Odeurs de cire, d’humus, de glaise. Humidité des murs.
Il faut enjamber des statues, passer par-dessus une caisse encombrée d’herbes
sèches, de coquilles d’œuf, d’écorces d’olivier, éviter un nageur en terre
cuite suspendu au plafond…Nous sommes dans l’atelier de Pascale, envoûtés par
le silence, la force qui se dégage de ses œuvres ébauchées, le regard insistant
de ses personnages accrochés aux endroits les plus inattendus. On n’ose parler
devant l’indicible. Comment se taire au milieu de cette humanité poignante
en miniature ?
Evoque-t-elle ses créations ? Pas tout de
suite : elle a besoin de temps, de sonder discrètement votre regard. Le
verbe, c'est évident, n'est pas la priorité des sculpteurs.
Alors elle vous explique. Elle vous livre sa démarche.
Et les mots pour la dire lui viennent aisément…. :
« Je travaillais depuis quelques mois sur le
thème du vertige lorsque j’ai rencontré Pascale Verdier et son lieu de vie
magique. J’ai tout de suite été touchée par les jardins : leurs aspects
structurés, maîtrisés mais prêts à reprendre leur liberté m’ont paru un bel
endroit pour y cacher des créations. Pourquoi pas mes dernières recherches sur
le vertige ?
Simultanément, des idées sur le thème de la curiosité
me tarabustaient. Ces deux recherches pourraient s’exposer ensemble dans ces
merveilleux jardins. Voilà le pari que nous avons fait.
Le travail sur le thème des curieux et du vertige
Le travail sur
le thème des curieux et du vertige implique pour une grande part
l’intervention du corps dans un sentiment. Il montre la diversité des
expressions corporelles : par exemple, dans une file de curieux, une
courbure plus ou moins accentuée. Des torsions ou des affaissements peuvent
exprimer la même chose. Le langage du corps a des écritures multiples pour
exprimer un même sentiment.
Dans le thème du vertige, je voudrais
troubler le spectateur à la vue d’un corps près du vide. Le spectateur
s’identifie au corps suspendu, crée un monde de déséquilibre dans les airs et
par ses propres gestes imagine la fin du mouvement. Vertige de l’amour où
l’expression du corps montre la sensualité, ambiguïté du plaisir et de la
douleur, en les suspendant j’accentue l’équivoque…
Quant à la curiosité, elle intervient
dans notre comportement tous les jours : ouvrir le courrier, parcourir les
titres du journal, quel est ce bruit dehors ?…Publicités, vitrines, nos
sociétés y font appel, parfois abusivement. C’est aussi un moteur puissant pour
la recherche et l’accès à la connaissance. Les corps l’expriment. Trouver la
forme que prend le corps et la transmettre à la matière, voilà un défi
intéressant. J’aimerais que le spectateur lui-même exprime avec son corps la
curiosité en l’obligeant à se baisser pour voir ou à se tendre pour regarder
les objets issus de mon travail.
Pourquoi montrer ces créations dans un jardin?
Pour remettre les corps à leur place, nus au
milieu de la nature, notre lieu initial et créateur. C’est un retour aux
premiers temps,à l’Eden perdu,au lien rompu depuis bien longtemps.
Les techniques
J’emploie pour traiter mes sujets deux techniques de
modelage aux antipodes l’une de l’autre : la terre cuite et la cire
perdue. L’une n’utilise qu’une matière, l’autre en utilise trois :
la cire, la terre et le métal. La terre se travaille au frais et dans
l’humidité, la cire dans la chaleur du soleil ou du corps. Ensuite, la terre
doit sécher, la cire doit fondre. Au final, les deux matières passent dans le
brasier, la terre à plus de 1000 degrés, le métal au-dessus de 900 degrés. Mais
l’un durcit dans la chaleur, l’autre fond d’abord avant de durcir après la
coulée. Ces deux matières souples dans l’expression par le modelage mais
rigoureuses dans la technique me permettent de donner une grande liberté
d’expression des corps.
.
Les boîtes de divination
Ce sont des objets utilisés par les féticheurs
africains : boîtes sans fond, calebasses, pots en terre cuite avec une
petite porte d’accès… Beaux objets pour des curieux ! Comment ça marche,
une boîte de divination ? On la place sur un lit de sable, de bâtonnets,
de cailloux. On y introduit par la porte un animal (cafard, souris, serpent,
etc.). On pose une question. L’animal s’agite, laisse des traces, déplace
bâtons et cailloux… Il n’y a plus qu’à interpréter les dires de l’animal.
Ces objets sont pour moi une ouverture sur le monde
des esprits, de l’au-delà, de l’imaginaire. Ils évoquent tous les espoirs et
les désespoirs des hommes en attente d’une réponse, bonne ou mauvaise, joyeuse
ou triste, fabuleuse ou énigmatique. L’instant vertigineux avant la réponse,
les corps sont suspendus dans l’attente et la curiosité : tout est
possible… »
Je reste abasourdi par tant de belles choses...Sa prochaine exposition aura lieu en septembre mais malheureusement je serai à 10 000 kilomètres de ces merveilles.
Prochaine
exposition : "La Moutardière"
83300- CAUSSADE
Du 9 septembre au 30 septembre
Vernissage le 12
Exposition de PASCALE BAS sous le titre "DU
TORCHIS AU TORCHON"
Tél : 05 63 93 21 79
JAC, le 13 septembre 2009
Merci, Phil, pour ces commentaires encourageants. Mon amical souvenir. Pascale
Rédigé par : Chedozot | 01/10/2009 à 13:44
On dirait qu'ils émergent des dunes de sable, ces personnages discrêts qui m'évoquent l'Afrique, la lenteur, le rêve.
Mon meilleur souvenir à l'artiste !
Rédigé par : Phil' | 27/09/2009 à 05:59